Exposition
27.02.02—07.04.02
Cette exposition est l’aboutissement d’un projet conçu par Cécile Pitois alors qu’elle vivait à Londres, « Trafalgar Square ou un souvenir de Londres ». Au centre de cette place, les pigeons ont élu domicile sur les quatre lions en bronze qui entourent la colonne Nelson, faisant la joie des touristes et le désespoir des citadins. Il est des territoires dont on se soucie peu, mais qui pourtant règlent notre quotidien : ceux qui délimitent la frontière entre l’homme et l’animal. Le pigeon a élu domicile sur et dans la plupart de nos monuments ; la ville, considérée comme le territoire de l’homme, se trouve ainsi parasitée par l’animal. Le pigeon surmontant le lion. L’image ne peut qu’imprégner le regard d’un artiste, voyant là le vivant, le non-domestique, incarné par le volatile, marquer de sa fiente le noble animal courageux et fier, coulé en bronze pour l’éternité.
Saisissant l’opportunité d’une exposition dans une chapelle, Cécile Pitois propose une installation sous forme d’exutoire. Après avoir capturé le pigeon et coulé son effigie en paraffine à 108 exemplaires, elle va se débarrasser métaphoriquement de l’animal et par la même occasion, de la sculpture. Après une lente consumation, l’objet va petit à petit se transformer et se répandre sur le sol. Toutes proportions gardées, c’est le même procédé de moulage qui permet de réaliser les lions de Trafalgar Square que celui utilisé pour les pigeons.
En prenant le contre-pied, avec ironie, des sculptures de cette place publique, l’artiste contraint à l’humilité d’un même coup l’art, le pigeon et le lion, en renvoyant inexorablement au sol ce qui était sur un piédestal/perchoir, dans une sorte de lent « happening ». Du sublime au trivial. Venant s’écraser pour former un « dripping » sur le sol recouvert de moquette, les pigeons deviennent les victimes innocentes du geste qui consiste à allumer une bougie, qu’il soit festif, commémoratif, ou religieux.
Texte de Marie Angelé